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Saint Vincent Ferrier (1350 – 1419)

Fêté le

5 avril

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Confesseur de l’ordre dominicain

La Messe 

Introït : « Dieu a ouvert sa bouche au milieu de l’Église, et l’a rempli de l’Esprit de sagesse et d’intelligence. Il l’a revêtu d’un vêtement glorieux. — Il a ramassé en lui un trésor de joie et d’allégresse. »

Oraison : « Dieu qui, par la prédication admirable du bienheureux Vincent, votre confesseur, avez daigné ramener à la connaissance de votre Nom une multitude de peuples, accordez à nos prières que nous méritions d’avoir pour nous récompenser dans le ciel, Celui qu’il annonça comme le Juge à venir sur la terre. »

Vincent Ferrier « a ouvert sa bouche dans l’Église », mais il l’a ouverte, sous l’inspiration de Dieu, d’une façon prophétique. Il est le grand prophète du Jugement dernier. Pour comprendre cette mission unique, il faut se mettre dans la situation de saint Vincent, au milieu des calamités effrayantes pour la foi que produisait le schisme d’Occident. Les peuples chrétiens ne savaient plus qui était le Chef légitime de l’Église. Il y avait deux, trois Papes, qui se disputaient la tiare. Quel était le successeur de Pierre, le Vicaire authentique de Jésus-Christ ? L’unité de l’Église était en péril.

Les rois, les cardinaux, des Saints s’occupaient activement de revenir à cette unité. Mais la réalité se présentait terrifiante pour la foi, pour la discipline chrétienne. De sorte

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que le schisme d’Occident apparaît comme une des calamités les plus douloureuses et les plus menaçantes qui aient pesé sur les destinées de l’Église. A ce titre, le schisme est une prophétie éclatante de la fin du monde.

Dieu prophétise par des actes comme par des paroles. Et la suprême calamité de la fin du monde se trouve figurée, annoncée par les calamités mondiales antérieures, comme la prise et la destruction de Jérusalem, qui dispersa le peuple juif ; comme la chute de l’Empire romain qui permit aux Barbares de transformer les nations ; comme le schisme d’Occident qui mit en péril l’Église elle-même, symbole de l’antéchrist à la fin des temps…

Vincent paraît pendant la période la plus aiguë de ce schisme, quand tout semble désespéré. Il entre dans cette prophétie, il en fait partie, elle s’incarne pour ainsi dire en lui. Et c’est pourquoi Vincent prêche à tous la venue prochaine du souverain Juge. Craignez Dieu, dit-il, car l’heure de son jugement est arrivée. Heure prophétique encore mais si menaçante que les peuples, terrifiés par les accents de l’homme de Dieu, se convertissaient en masse. On écoutait Vincent, on le suivait et l’on vit à travers l’Europe cette « Compagnie » qui ne le quittait pas, avide de l’entendre. C’est pourquoi aussi Vincent convertit à la foi tant de Juifs, dont le retour au vrai Messie ajoutait un caractère de

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plus à la prophétie du Jugement dernier.

Aussi la liturgie consacre officiellement cette mission extraordinaire de saint Vincent Ferrier.

Lecture du Livre de l’Apocalypse de l’apôtre saint Jean, c. 1 : « En ces jours-là, je vis un autre Ange qui volait au milieu du ciel. Il portait l’Évangile éternel, pour le faire connaître à tous les habitants de la terre, à toute nation, à toute tribu, à toute langue et à tout peuple. Il disait d’une voix éclatante : Craignez le Seigneur et rendez-lui gloire car l’heure de son jugement est venue. Adorez celui qui a fait le ciel et la terre, la mer et les sources des eaux. »

Un jour, saint Vincent prêchait devant une multitude, à Salamanque ; il faisait le tableau du Jugement dernier et citait ces paroles de l’Ange, lorsque tout à coup il s’arrêta. Une lumière intime, divine, envahit son intelligence, il eut conscience de lui-même et d’une voix forte, avec l’assurance de la révélation surnaturelle qui le dominait, il s’écria : Je suis moi-même cet Ange vu par saint Jean. L’affirmation était hardie. Il y eut des murmures, la foule devint houleuse. Vincent, fort de la lumière reçu, ne recule pas. Une femme était morte dans une maison voisine, il fait apporter le cadavre : Lève-toi, lui dit-il, et déclare à ce peuple si oui ou non je suis l’ange qui doit prêcher à tous le Jugement dernier. — « Père, vous êtes cet Ange ! » Le cadavre s’était levé, il avait parlé.

L’Église a authentiqué cette mission providentielle tant dans la bulle de canonisation de saint Vincent que dans la liturgie.

Graduel : « La bouche du Juste est pleine de sagesse, sa langue dit ce qui est juste. — La loi de Dieu est dans son cœur, ses pas sont assurés. »

Trait : « Il est comme l’étoile du matin dans la brume légère, comme la lune au plein de ses jours. — Et comme un soleil resplendissant, il brille dans la maison de Dieu. — Il

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est comme l’arc-en-ciel qui illumine de sa gloire les nuées du ciel et comme un parterre de roses aux jours du printemps. — Comme les lis qui s’élèvent sur le bord de l’eau, comme le parfum de l’encens aux jours d’été. — Comme un feu étincelant, comme l’encens sur un brasier ardent. — Comme un vase d’or massif, orné de pierres précieuses. »

 

Au Temps pascal : « Alléluia, alléluia, ô Vincent, glorieux Père, illustre enfant de l’Ordre de Dominique, offrez vos prières au souverain Juge, pour tous les peuples qui vous vénèrent. »

Évangile selon saint Matthieu, c. 5 : « En ce temps-là, Jésus dit à ses disciples : Vous êtes le sel de la terre. Si le sel perd sa force, avec quoi salera- t-on ? Il n’est plus bon à rien qu’à être jeté dehors et foulé aux pieds par les hommes. Vous êtes la lumière du monde. Une ville située sur une montagne ne peut être cachée, et on n’allume point une lampe pour la mettre sous le boisseau ; mais on la met sur un chandelier, afin qu’elle éclaire tous ceux qui sont dans la maison. Ainsi, que votre lumière brille devant les hommes, afin qu’ils voient vos bonnes œuvres, et qu’ils glorifient votre Père qui est dans les Cieux. Ne pensez pas que je sois venu détruire la loi et les Prophètes : je ne suis pas venu les détruire, mais les accomplir ; car je vous le dis en vérité, le ciel et la terre ne passeront point sans que tout ce qui est dans la loi soit accompli parfaitement, jusqu’à un seul iota et à un seul point. Celui donc qui violera le moindre de ces commandements, et qui apprendra aux hommes à le violer, sera le plus petit dans le royaume des cieux ; mais celui qui fera et enseignera, sera grand dans le royaume des cieux. » 

Offertoire : « Ma miséricorde et ma vérité seront avec lui, et sa puissance croîtra par la vertu de mon nom. »

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Secrète : « Seigneur, nous vous offrons les présents de notre piété, mais pour qu’ils vous soient agréables et qu’ils soient salutaires pour nous, que le bienheureux Vincent, votre confesseur, rendu si glorieux sur terre par vos dons, devienne notre intercesseur auprès de votre clémence. »

Communion : « Je donnerai au vainqueur à manger de l’arbre de vie qui est dans le Paradis de mon Dieu. »

Vincenti dabo… Il y a un jeu de mots sur le nom de Vincent que le français ne peut rendre. 

Postcommunion : « Rassasiés, Seigneur, par les dons divins, nous vous demandons que, par les mérites glorieux du bienheureux Vincent, votre confesseur, nous ressentions en nous l’effet désiré de la Victime du salut. »

Craignez le Seigneur, car son Jugement est proche. L’heure vient, elle sonne à tout instant autour de nous. Elle atteint notre voisin : aujourd’hui pour moi, demain pour toi !

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Jugement personnel, mais irrévocable dont le suprême, l’universel le public ne sera que la confirmation solennelle. Le livre de notre vie, dont pas une syllabe n’est perdue, sera ouvert devant nous, en pleine lumière de vérité. Qu’aurons-nous écrit sur ces pages ? Notre conscience lira elle-même et portera la sentence. Car au Jugement de Dieu on est, en somme, sous la lumière implacable de la vérité, son propre juge. On se voit jusqu’au fond, d’un coup d’œil, et l’on porte soi-même la sentence : digne de Dieu ou indigne. Le tout est là. Digne de Dieu par sa miséricorde qui nous aura sauvés, purifiés au moins pour l’essentiel, le reste est la chose du Purgatoire ; mais même avec le Purgatoire, c’est le salut certain, la possession éternelle de Dieu assurée.

Et puis, il y a l’autre sentence, l’affreuse, celle où l’on se dit : je suis perdu !

Perdu par ma faute, car on voit avec une cruelle certitude que l’on est perdu par sa propre faute. Là, aucune rémission. De son propre poids, on descend au lieu de monter ; on descend dans l’abîme éternel. Et chacun de nous, à l’heure où souvent il y pense le moins, paraît au Jugement de Dieu : Craignez le Seigneur, car l’heure de son jugement vient.

Après vingt ans de cet apostolat inouï, pour compléter en sa personne la figure expressive de la fin des Temps, Vincent Ferrier mourait à Vannes, en Bretagne, l’Occident du monde. Sa mort, comme sa vie garde le caractère prophétique de sa mission.