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La Dédicace des basiliques de Saint-Pierre et de Saint-Paul

Fêté le

18 novembre

Cette solennité consacre la mémoire des tombeaux de saint Pierre et de saint Paul. Mémoire glorieuse et chère entre toutes aux fidèles du Christ. Car Pierre et Paul sont les colonnes de la foi.

Crucifié la tête en bas dans le cirque de Néron, que longeait la Via Aurelia, au-delà du Tibre, au pied du mont Vatican, Pierre fut enseveli immédiatement dans une propriété chrétienne, de l’autre côté de la Via Aurelia, où déjà reposaient les premiers martyrs de Néron, brûlés vifs comme des torches ardentes dans ce même cirque.

Dès le IIe siècle, le prêtre Caius écrivait : « je puis te montrer les trophées des apôtres, car, soit que tu ailles au Vatican ou sur la voie d’Ostie, tu trouveras les trophées de ceux qui ont fondé cette Église. » De nombreux témoignages de premier ordre s’ajoutent à l’affirmation de Caius. De sorte que le lieu précis où fut enseveli saint Pierre est déterminé de la façon la plus nette.

Ce tombeau fut, pour les chrétiens, un lieu de vénération, comme le centre de la vie chrétienne à Rome, Dès l’an 96, le Pape Anaclet éleva sur la sépulture de l’apôtre un monument ou memoria de dimension suffisante pour lui donner asile à lui-même et à ses successeurs. C’est ce que l’on appelle l’oratoire d’Anaclet, la cathédrale des Papes jusqu’à Constantin.

La loi romaine assurait à tous la liberté de sépulture et son respect. Riches et pauvres avaient le droit de s’élever des tombeaux le long des voies publiques et nul ne pouvait en violer la propriété. Même aux époques les plus sombres et les plus sanglantes des persécutions, les cimetières, catacombes et lieux de réunion bâtis dessus, furent respectés. Valérien seul osa les violer. En somme c’est par ses cimetières que l’Église eut à Rome et dans tout l’empire une situation légale.

Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que l’oratoire d’Anaclet, placé dans un cimetière légal, ait servi de lieu ordinaire de réunion aux chrétiens. Là, ils étaient chez eux, protégés par le droit commun.

Dans un rescrit impérial, Marc-Aurèle reconnaît ce droit et le confirme. Il ordonne « que les cadavres qui ont reçu une juste sépulture ne soient jamais troublés dans leur repos ». Les suppliciés eux-mêmes — comme Pierre et Paul — ne doivent pas être refusés à ceux qui les réclament.

Ces lois protectrices, inaugurées avant le Christianisme, quoiqu’en dehors de lui, et confirmées dans leur développement pendant les trois siècles de persécutions, ont un caractère providentiel qui éclate à tous les yeux. L’Église entre naturellement dans le cadre légal, sans violence ; on dirait qu’il est fait pour elle, à sa convenance, tant elle s’y glisse avec facilité. C’est l’origine de toutes les catacombes.

Chose remarquable ! Le salut du monde vient par la mort du Christ, il sort d’un tombeau. Pour grandir et se répandre, l’Église suit la même voie. La mort assure sa liberté ; le tombeau lui donne le droit de vivre. L’Église y trouve l’inviolabilité de ses domaines, l’immunité de ses habitations, la légalité de ses réunions. Les empereurs et le Sénat, croyant protéger uniquement le droit des pauvres à pleurer leurs morts, travaillaient à la grande œuvre de l’évangélisation du monde. D’une main ils tenaient la hache pour tuer les chrétiens, de l’autre la loi qui en sauvait la semence.

Le tombeau de saint Pierre, protégé par la loi romaine, abrité sous l’oratoire d’Anaclet, attendit l’empereur Constantin pour être glorifié. Constantin voulut faire vite. L’oratoire d’Anaclet étant situé près du cirque de Néron, mais de l’autre côté de la Via Aurelia, l’empereur se servit du cirque lui-même pour élever la première basilique de Saint-Pierre. Il appuya ses deux nefs de gauche sur les assises mêmes du cirque et bâtit l’ensemble de la basilique avec les matériaux du cirque démoli. De sorte que les pierres du Cirque de Néron — revanche divine ! — servirent à glorifier celui qu’il y avait crucifié. Aussi, sur les pierres, on lisait dans la nouvelle basilique, toutes sortes d’inscriptions, sans suite, accolées au hasard de la construction.

La basilique constantinienne s’enrichit des plus somptueuses décorations. Nous ne pouvons la décrire ici.

Le lieu le plus sacré, le plus cher à nos pères et le plus vénéré, était ce que l’on appelait la Confession de Saint-Pierre. On entend par « Confession » dans une basilique, l’endroit où repose le corps d’un martyr, ordinairement situé dans une excavation plus ou moins profonde sous l’autel majeur. Dans la basilique de Saint-Pierre, la Confession est donc le lieu même où repose le corps de saint Pierre. C’est le lieu même, aujourd’hui encore, où le corps de l’apôtre, détaché de la croix, fut déposé. Pour ne pas le changer de place, on l’a même laissé de biais. Il n’est pas dans l’axe de la basilique.

Constantin le renferma dans un sarcophage d’argent revêtu d’airain, ayant cinq pieds de chaque côté. Ce sarcophage fut placé exactement au lieu où était l’ancien, dans le même sens. Autour l’empereur éleva une chambre sépulcrale somptueuse, que l’on appelait la Chambre royale. Elle fut voûtée, mais de manière à ce qu’il y eût communication permanente entre le sarcophage et la basilique supérieure, entre Pierre et ses enfants. La voûte, arrivant au niveau du pavé de la basilique, fut recouverte d’une plaque de marbre, mais au milieu, un soupirail traversant l’épaisseur de la plaque et de la voûte, laissait un vide, de sorte que, en se baissant à plat ventre sur la plaque, au-dessus du soupirail, on voyait au fond le sarcophage de bronze, orné d’une croix d’or.

La joie de nos pères, la joie de toute leur vie était de se traîner à genoux jusqu’à cette ouverture et par elle, de contempler le sarcophage du bienheureux apôtre. Ils y faisaient toucher, au moyen d’une gaule, des linges qu’ils remportaient chez eux comme un trésor.

Au IXe siècle, à l’invasion des Sarrasins, sous le pontificat de Sergius II, on mura la voûte supérieure pour protéger le corps de saint Pierre. De sorte que, depuis cette époque, jamais on n’a revu le tombeau de l’Apôtre.

Tous ces glorieux souvenirs sont célébrés en cette fête de la Dédicace qui nous invite à nous rappeler la foi de nos pères et à imiter leur tendre dévotion pour saint Pierre.

Ce qui vient d’être exposé s’applique pareillement au tombeau de saint Paul qui fut disposé de la même manière. Le grand apôtre fut enseveli sur la voie d’Ostie, dans une propriété chrétienne. Constantin bâtit également une basilique pour l’honorer. Comme celle de Saint-Pierre, ruinée par les siècles, elle fut restaurée à plusieurs reprises.

Chacun sait que la basilique de Saint-Pierre fut reconstruite de fond en comble. Cette reconstruction dura trois siècles. Des Papes et des artistes de génie unirent leurs efforts pour élever à l’apôtre un monument digne de lui. Michel-Ange jeta dans les airs la merveilleuse coupole qui est, au-dessus de ce tombeau, comme une couronne de gloire. Et à la base de cette couronne, on lit ces paroles du Christ : « Tu es Pierre et sur cette Pierre je bâtirai mon Église ».

Le Pape Silvestre consacra la basilique de Constantin le 18 novembre.

Urbain VIII consacra la nouvelle basilique, ce même jour, en l’an 1626. Mais elle n’était pas encore terminée.

La basilique de Saint-Paul, entièrement ruinée par un incendie en 1823, fut reconstruite sur des plans plus vastes et de façon plus somptueuse, Pie IX la consacra le 8 décembre 1854.

Tous ces souvenirs se pressent autour des tombeaux apostoliques. Ils nous racontent tout un passé de foi chrétienne. Ils nous redisent l’enseignement des fondateurs de l’Église, leur amour passionné pour le Seigneur Jésus. C’est leur sang versé pour lui que l’on glorifie par ces augustes monuments. Ce qui fait la grandeur de Pierre et la grandeur de Paul, c’est leur amour pour le Christ, et cet amour, nous pouvons et nous devons le posséder en nous.