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Bienheureux Albert le Grand (1206 – 1280)

Fêté le

15 novembre

Confesseur, Pontife, de l’Ordre dominicain

MESSE : Statuit

Oraison : « Seigneur, daignez exaucer les prières que nous vous présentons en cette solennité du bienheureux Albert, votre Confesseur et Pontife, afin que nous soyons absous de nos fautes par les mérites de celui qui vous a dignement servi ».

Albert, surnommé le Grand à cause de sa science incomparable, naquit à Lauingen sur le Danube, en Bavière ; dès son enfance, il fut élevé avec soin. Il quitta sa patrie pour poursuivre ses études, et tandis qu’il séjournait à Padoue, il suivit les conseils du bienheureux Jourdain, Maître Général de l’Ordre des Prêcheurs, et demanda à être admis dans la famille dominicaine, malgré la résistance de son oncle. Admis parmi les frères, tout entier donné à Dieu, il se distingua par l’observance religieuse et la piété, et fut animé d’une dévotion toute filiale et très tendre envers la bienheureuse Vierge Marie. Faisant passer la prière avant l’étude, il ordonna son activité de telle sorte que, profès d’un Ordre apostolique, il devint rapidement apte à prêcher la parole de Dieu et à promouvoir le salut des âmes. Envoyé bientôt à Cologne pour y terminer ses études, il fit de tels progrès que, dépassant tous ses contemporains, il étudia presque toutes les sciences profanes et étendit leurs domaines. Puisant à la source de la loi divine, affirme Alexandre IV, il but à longs traits le breuvage salutaire de la science, si bien que sa pensée semblait en contenir la plénitude.

Afin d’enrichir les autres des trésors de la science, il fut nommé lecteur à Hildesheim, puis à Fribourg, à Ratisbonne et à Strasbourg. Comme son enseignement à la célèbre Université de Paris ajoutait un nouvel éclat à la Faculté de Théologie et attirait l’admiration de tous, il fut nommé Maître en théologie.

Devenu professeur, Albert étonna le monde par l’acuité de son génie. A Cologne, à Paris, il était le premier des maîtres. Si bien que la salle du couvent de Saint-Jacques où il enseignait à Paris étant trop petite, il fut obligé pour satisfaire son immense auditoire, de faire ses leçons sur la place publique. Elle prit son nom, qu’elle porte encore aujourd’hui : la place Maubert ou de Maître Albert.

Le premier, Albert fit pénétrer dans l’enseignement universitaire la philosophie d’Aristote. Timidement d’abord, car Aristote était suspect à beaucoup et même retranché de l’enseignement par une sorte d’excommunication papale. Ayant ramené aux normes de la droite raison les doctrines des philosophes païens, il démontra plus clairement leur harmonie avec la foi. Il suscita l’admiration par son exposé des mystères divins. Les nombreux écrits qu’il a laissés, concernant la plupart des sciences, témoignent de son puissant génie et du labeur infatigable qu’il exerçait dans toutes les branches du savoir et en particulier de la théologie. Il revint à Cologne pour y être régent du Studium général de l’Ordre ; son succès fut tel que son autorité et la renommée de sa science s’affirmèrent de plus en plus dans les écoles.

Mais Albert avait formé à Cologne et amené avec lui à Paris un Frère étudiant qui allait briser toutes les barrières, baptiser Aristote et bâtir avec ses principes adaptés à la foi chrétienne le monument merveilleux qui s’appelle la Somme Théologique. Cet étudiant était Frère Thomas d’Aquin qui fut son disciple de prédilection. Albert fut le premier à percevoir et à proclamer la profondeur de son esprit. Albert eut l’intuition du génie de ce disciple dont la doctrine allait surpassé la sienne ; mais dans son âme de saint, il n’y eut que la joie toute pure de former pour l’Ordre et pour l’Église un pareil docteur.

Albert était animé d’une très tendre dévotion envers le saint Sacrement de l’autel et la traduisit en des écrits admirables. Par lui les voies de la mystique s’ouvrirent largement aux âmes, à tel point que le zèle fécond d’un tel maître porta ses fruits bien loin dans l’Église.

Le rayonnement de sa vie religieuse et ses exemples portèrent ses frères à l’élire Prieur de la Province d’Allemagne, malgré ses charges déjà si lourdes. Appelé à Anagni, il réfuta les erreurs de Guillaume qui attaquait les Ordres mendiants avec une audace impie, devant le Souverain Pontife Alexandre IV, qui le nomma ensuite évêque de Ratisbonne. Il se consacra entièrement à la garde de son troupeau, sans rien changer à la simplicité de son genre de vie ni à son amour de la pauvreté. Cet honneur ne lui fut pas très agréable. Albert était avant tout un homme d’étude. Aussi donna-t-il sa démission et il revint à Cologne, au milieu des étudiants. Il n’en continua pas moins à partager les soucis des évêques et à veiller aux intérêts spirituels de la Germanie et des pays voisins. A ceux qui sollicitaient ses conseils, il répondait avec une rectitude et une opportunité remarquables ; il se montrait si prudent pour apaiser les discordes que non seulement Cologne le réclama comme pacificateur, mais encore des prélats et des princes l’appelèrent en des régions éloignées comme arbitre pour régler leurs désaccords. Saint Louis, roi de France, lui donna des reliques de la Passion du Christ, objet de sa très grande vénération. Au second Concile de Lyon il traita des affaires très importantes. A quatre-vingt-trois ans, il enseignait encore. Enfin, épuisé de vieillesse, il cessa d’enseigner. Dès lors il s’absorba dans la contemplation, et il entra dans la joie de son Maître en 1280. Son disciple très aimé, Thomas d’Aquin, l’avait précédé dans la tombe. Albert était même venu à Paris, malgré son grand âge, pour y défendre sa doctrine.

Pour mettre le comble au culte déjà accordé à Albert avec l’approbation du Saint-Siège dans plusieurs diocèses et dans l’Ordre des Prêcheurs, le Pape Pie XI, agréant très volontiers le vœu de la sacrée Congrégation des Rites, étendit à l’Église entière la fête de saint Albert le Grand, après avoir décerné à celui-ci le titre de Docteur ; et le Pape Pie XII le nomma et l’institua Patron auprès de Dieu de ceux qui s’adonnent à l’étude des sciences naturelles.

Ces deux grandes âmes, riches de lumière, riches d’amour de Dieu, paraissent en ces premiers temps de l’Ordre des Prêcheurs, comme des soleils éclatants. Albert et Thomas incarnent le sens précis, authentique de la pensée dominicaine qui est de propager, d’éclairer et de défendre la foi. Saluons-les de loin avec la plus profonde, la plus affectueuse, la plus reconnaissante vénération. Ils sont nos Pères dans la foi, nos maîtres et notre plus grande gloire.