Édifiant mémorial de la complicité laïcité-islam
Depuis plus d’un siècle, la Laïcité (pseudonyme de la franc-maçonnerie) travaille méthodiquement à déchristianiser la France. Mais en même temps, elle promeut l’islam.
De cette complicité laïcité-islam, il existe un monument en plein Paris, édifié en 1926 avec l’argent des Français (à l’heure même où l’on volait les églises des catholiques) : la grande mosquée de Paris.
La très édifiante histoire de la mosquée de Paris
Au lendemain de la guerre de 1870, les catholiques français avaient édifié – grâce à leurs aumônes privées – la basilique de Montmartre.
Au lendemain de la guerre de 1914-1918, c’est une mosquée que les loges maçonniques décident d’édifier. Sur fonds publics. Le but n’est pas de satisfaire les musulmans (qui, à l’époque, ne demandent rien de tel) mais d’humilier les catholiques.
Née dans les loges [1], l’idée est aussitôt adoptée par le gouvernement français et par Jules Cambon (gouverneur général de l’Algérie).
Édouard Herriot présente le projet (juin 1920)
Les frais de construction sont énormes, mais Édouard Herriot lui-même s’en occupe. Le 30 juin 1920, le député anticlérical (qui milite au même moment pour l’expulsion des moines et la confiscation des écoles catholiques) présente à la Chambre des députés un projet de loi accordant une subvention de 500 000 francs « pour la construction d’une mosquée, d’une bibliothèque, d’une salle d’études et de conférences […], une vraie maison de l’islam ».
Il précise :
Le Gouvernement demande un premier crédit de 500 000 francs. […] Évidemment, ces 500 000 francs ne suffiront pas ; ce n’est qu’un premier crédit, à titre indicatif.
Tout le camp « laïc » applaudit. Les députés radicaux, qui ne peuvent pas voir une soutane sans hurler à la mort, bondissent de joie à l’idée de construire une mosquée. Un seul député, M. Ballande, ose timidement demander :
— Et la séparation des Églises et de l’État ?
Édouard Herriot attendait l’objection. Il connaît bien cette Loi de séparation dont il est le champion face aux catholiques. Mais pas face aux musulmans. Il a décidé de tourner la loi, et, dans une étonnante inertie de l’Assemblée, il explique comment :
Je vais vous expliquer […]. Je vais vous expliquer […]. Il n’y a pas de contradiction… Nous nous sommes préoccupés de cette question […]. Il n’y a aucun inconvénient à donner aux musulmans une mosquée, puisque très légitimement nous donnons aux catholiques des églises […].
On s’attendrait, ici, à un tollé de protestations. Le gouvernement ne donne aucune église aux catholiques. Il ne fait que leur laisser l’usage partiel des bâtiments qu’il leur a volés en 1905 (tout en laissant tomber en ruine certaines églises afin de pouvoir ensuite les détruire légalement, au motif qu’elles sont « irréparables »).
Or le Journal officiel ne note aucune interruption (sinon, à la fin, des « applaudissements à gauche »). Herriot poursuit tranquillement :
Ce qu’il fallait, c’est que l’État n’intervînt pas directement dans l’attribution des mosquées. Il existe une Société des Habbous des Lieux saints de l’islam […]. C’est à cette Société des Habbous que sera dévolue l’administration de la mosquée, de l’Institut musulman.
Ainsi, les intérêts essentiels que nous voulons sauvegarder seront respectés, les libertés que nous voulons développer pourront se développer sans aucune contrainte ; en même temps, ce qui nous préoccupait, les lois de l’État seront parfaitement respectées.
Édouard Herriot détaille la constitution de cette Société des Habbous des Lieux saints de l’islam, qui ne comprend que des musulmans :
Une œuvre pareille doit, pour réussir, être confiée à des musulmans et dirigée par eux. Nos meilleures intentions ne sont pas toujours comprises. Mieux vaut laisser aux intéressés le soin de dire les leurs et de les appliquer. La Société des Habbous des Lieux saints de l’islam, constituée sous l’égide du gouvernement français, représente l’instrument le plus qualifié pour assurer l’exécution du projet qui vous est soumis.
Cette Société comprend, en effet, pour le Maroc, le grand vizir chérifien, le chambellan du sultan, le ministre de la Justice et du Culte, les cadis de Fez et des ulémas [2] de l’université de Quaraouin ; pour l’Algérie, des cadis [3] , des muphtis [4] , bachaghas [5] et le président de la représentation arabe aux délégations financières ; pour la Tunisie, les deux Cheikh-el-Islam [6] des cultes Hanefite et Malekite, le ministre de la Plume du Bey, le gouverneur de Tunis, des cadis, etc. ; bref, tout ce que notre Afrique du Nord comprend de notables autorisés et dignes d’exprimer la pensée de l’islam français.
La Société des Habbous des Lieux saints recevrait donc du Gouvernement le mandat d’organiser l’Institut musulman.
En réalité, la Loi de séparation indiquait, à l’article 2, que « la République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte ». L’article 19 précisait (§ 6) que les associations cultuelles « ne pourront, sous quelque forme que ce soit, recevoir des subventions de l’État, des départements ou des communes ».
La contradiction est manifeste, puisque Édouard Herriot a déclaré tranquillement à la Tribune que son projet « consiste essentiellement en la création, à Paris, d’une mosquée ». Mais aucun député ne réagit. Le projet Herriot est adopté à la Chambre, le 9 juillet 1920.
Son article unique est ainsi conçu :
Il est ouvert au ministère des Affaires étrangères, en addition aux crédits provisoires alloués au titre de l’exercice 1920, un crédit de cinq cent mille francs (500 000 francs), qui sera inscrit à un chapitre nouveau G bis des dépenses exceptionnelles de son département, intitulé : « Subvention à la Société des Habbous des Lieux saints de l’islam pour la construction d’un Institut musulman à Paris. »
On vote à mains levées. Personne ne demande la parole.
Discussion au Sénat (31 juillet 1920)
C’est Raphaël-Georges Lévy qui défend le projet au Sénat, au nom du gouvernement. Le sénateur israélite invoque l’urgence, demande la discussion immédiate à la séance du 31 juillet 1920, et n’hésite pas à affirmer – sans aucun fondement, mais sans recevoir de réplique – que Paris est la seule grande capitale sans mosquée.
Le sénateur Dominique Delahaye réagit en soulignant qu’on vient de débattre, quelques minutes auparavant, de l’affectation d’un bâtiment confisqué aux jésuites. On vole aux uns et on donne aux autres. Il s’exclame :
Il serait bientôt temps de traiter les catholiques aussi bien que les musulmans !
Riposte immédiate du sénateur François Albert : « C’est de la jalousie ! »
Ce cri du cœur mérite d’être retenu. François Albert, qui sera bientôt élu président de la très maçonnique « Ligue de l’enseignement » puis ministre de l’Instruction publique dans le gouvernement d’Édouard Herriot (15 juin 1924), est un des plus éminents représentants du camp « laïc ». Il milite pour la suppression totale des écoles catholiques et, en attendant, multiplie les vexations à leur égard. En 1924, la publication d’une « Note confidentielle adressée aux instituteurs » par les inspecteurs départementaux de l’Éducation suscitera quelque émotion :
Note confidentielle adressée aux instituteurs
Par application de la circulaire ministérielle du 9 août dernier, vous êtes prié de me faire connaître dans les cinq jours s’il y a dans votre commune des fonctionnaires qui confient l’éducation de leurs enfants à des écoles privées (indiquer s’il y a lieu leur nom et leur fonction).
(Nom de la ville de départ), le …………………
L’inspecteur primaire.
Est-ce une nouvelle « affaire des fiches » ? De tous côtés, des fonctionnaires, des receveurs des postes, des agents communaux se plaignent de subir des pressions très insistantes pour retirer leurs enfants des écoles catholiques. Même la CGT proteste contre ces empiètements sectaires. A peine gêné, François Albert finira par déclarer (on appréciera le « toutefois ») :
Je n’ai nullement l’intention de porter atteinte, dans la personne des fonctionnaires, au droit que possède tout père de famille de choisir pour ses enfants l’école qui lui convient. Toutefois je ne puis m’empêcher de regretter que des fonctionnaires publics ne marquent pas pour l’enseignement de l’État la confiance qu’il mérite. Et s’il s’en trouve dans votre département, je vous prie de leur exprimer ce regret [7].
Contre les catholiques, François Albert multiplie les brimades, les vexations, les persécutions. Il veut à tout prix déchristianiser la France. Mais lorsqu’on emploie l’argent public pour bâtir une mosquée, le même François Albert applaudit.
De fait, la loi « portant affectation d’une subvention de 500 000 francs à la Société des Habbous des Lieux saints de l’islam pour la construction d’un Institut musulman à Paris » est adoptée telle quelle au Sénat (par 227 voix contre 11) et paraît au Journal Officiel du 21 août 1920 (p. 12287).
Un débat tardif (novembre 1920)
La loi est votée depuis plusieurs mois lorsqu’elle suscite – enfin ! – un petit débat à l’Assemblée nationale, le 16 novembre 1920.
On discute ce jour-là de l’opportunité de rétablir les relations diplomatiques entre la France et le Saint-Siège. Édouard Herriot combat ce projet. Établir une ambassade au Vatican serait, prétend-il, reconnaître un culte. Or l’article 2 de la loi de séparation affirme que « la République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte ».
Un député interpelle Herriot et lui rappelle qu’il a lui-même présenté le rapport pour la construction de la mosquée. Le débat s’engage – surréaliste :
Édouard Herriot (s’opposant à l’ambassade au Vatican): — L’article 2 de la loi de séparation dit : « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. »
Paul Gay : — Vous avez rapporté l’Institut musulman et sa mosquée.
Herriot : — Du tout, mon cher collègue. Puisque vous m’interrompez, je vous réponds que nous ne subventionnons aucun culte ; nous ne vous avons pas demandé de subvention pour une mosquée; pour éviter cette faute contre la loi, nous avons subventionné la société des Habbous.
Paul Gay : — Pas d’hypocrisie ! (Mouvements divers).
Herriot : — Je ne vous réponds plus.
le Président (à Paul Gay) : — Veuillez ne pas employer de mots de ce genre. M. Herriot s’exprime toujours avec une parfaite loyauté.
Herriot : — J’aurais répondu en détail à une question, je refuse de répondre à une grossièreté.
Paul Gay : — Je ne retire pas le mot. (Interruptions à gauche et à l’extrême gauche).
le Président : — Je vous rappelle à l’ordre.
Herriot : — Il y a d’autres lieux que celui-ci pour provoquer ou régler les scandales. (Très bien ! Très bien ! à gauche).
La municipalité de Paris offre le terrain (janvier 1921)
Les 500 000 francs ne sont qu’un début. Le 4 janvier 1921, le Petit Parisien annonce que le président de la Société des Habbous des Lieux saints de l’islam
a demandé à chacune de nos trois possessions nord-africaines, Algérie, Tunisie et Maroc, une subvention de 150 000 francs, qui va lui être accordée. La ville de Paris va prochainement accorder – et désigner – le terrain nécessaire.
Effectivement, dans un généreux enthousiasme, le conseil municipal de Paris décide d’octroyer gratuitement le terrain de l’ancien Hôpital de la Pitié pour l’édification de la mosquée. C’est une subvention en nature. Lorsqu’il s‘agit de culte catholique, les subventions municipales sont interdites, et, au besoin, annulées par l’autorité préfectorale. Les catholiques d’Ancenis en savent quelque chose puisqu’une subvention votée par le conseil municipal de cette ville avant la loi de séparation (le 14 avril 1905) avait été annulée par le Préfet, au nom de la loi postérieure (9 décembre 1905). Le conseil d’État a validé cette interdiction préfectorale (arrêté contre la ville d’Ancenis, 1er juillet 1910). Mais, en République laïque, ce qui est interdit pour les catholiques est permis pour les musulmans.
Construction de la mosquée (1922-1926)
Le 1er mars 1922, la Société des Habbous de l’islam prend possession du terrain et fixe l’orientation de la mosquée. La pose de la première pierre a lieu le 19 octobre, en grand apparat, et en présence de représentants du gouvernement « laïc ». Le maréchal Lyautey, invité d’honneur, glisse dans son discours :
Ce dont il faut être bien pénétré, si l’on veut bien servir la France en pays d’islam, c’est qu’il ne suffit pas de respecter leur religion, il faut aussi respecter les autres, à commencer par celle dans laquelle est né et a grandi notre pays [8].
Timide, mais judicieuse remarque.
Le 13 juillet 1926, Moulay-Youssef – sultan du Maroc et « commandeur des croyants » depuis la chute du califat de Constantinople – arrive à Paris pour l’inauguration de la mosquée. Le 14 juillet sera, cette année, laïco-islamique.
Doumergue, Briand, Herriot, Barthou vont religieusement à la mosquée, où le premier d’entre eux déclare, d’un ton lyrique :
Les docteurs musulmans ont exalté le respect de la dignité individuelle et de la liberté humaine.
La presse est plus réticente. Louis Romier note, dans Le Figaro :
Il y a dans un tel geste une sorte d’hypocrisie mi-sérieuse, mi-bouffonne… Seuls, sont vraiment civilisateurs, les peuples qui ont conscience de leur noblesse, qui la démontrent par leurs actes, qui l’affirment nettement dans leurs choix. […] Qu’allons-nous faire et enseigner dans les pays d’islam ? Pourquoi troublons-nous le rythme de leur existence séculaire […] ? Car enfin, ou bien l’enseignement des mosquées est égal au nôtre, et par là tombe notre droit d’en déranger les effets, ou bien cet enseignement est inférieur au nôtre et pourquoi en redresser le prestige au sein même de notre capitale ?
Action Française, Charles Maurras va plus loin et demande : « Qui colonise, désormais ? Qui est colonisé ? Eux ou nous ? » Il détaille :
[…] Nous sommes probablement en train de faire une grosse sottise. Cette mosquée en plein Paris ne me dit rien de bon. Il n’y a peut-être pas de réveil de l’islam, auquel cas tout ce que je dis ne tient pas et tout ce que l’on fait se trouve être aussi la plus vaine des choses. Mais, s’il y a un réveil de l’islam, et je ne crois pas que l’on puisse en douter, un trophée de la foi coranique sur cette colline Sainte-Geneviève où tous les plus grands docteurs de la chrétienté enseignèrent contre l’islam représente plus qu’une offense à notre passé : une menace pour notre avenir […]. La construction officielle de la mosquée et surtout son inauguration en grande pompe républicaine, exprime quelque chose qui ressemble à une pénétration de notre pays et à sa prise de possession par nos sujets et nos protégés. Ceux-ci la tiendront immanquablement pour un obscur aveu de faiblesse […]. J’aperçois, de ci de là, tel sourire supérieur. J’entends, je lis telles déclarations sur l’égalité des cultes et des races. On sera sage de ne pas les laisser propager, trop loin d’ici, par des haut-parleurs trop puissants. Le conquérant trop attentif à la foi du conquis est un conquérant qui ne dure guère. Nous venons de transgresser les justes bornes de la tolérance, du respect et de l’amitié. Nous venons de commettre le crime d’excès. Fasse le Ciel que nous n’ayons pas à le payer avant peu […].
Ce bon sens fait presque figure de prophétie. Mais cet épisode montre surtout la vraie nature de la « laïcité ».
En apparence, laïcité et islam s’opposent comme deux excès contraires.
La religion de l’homme qui se prend pour Dieu, en face de la religion du Dieu inaccessible à l’homme.
Mais ces deux extrêmes partagent la même haine : contre Jésus-Christ crucifié pour nous sauver, et contre l’Église qu’il a fondée.
Cette haine commune ne désigne-t-elle pas clairement la vraie religion ?
D’après l’article « Laïcislamisation »,
dans Le Sel de la terre 94, p. 51-70.
[1] Voir Revue des objections, 8e année, n°3 (mai-juin 1927), p. 258.
[2] Docteurs de la loi équivalents aux rabbins juifs.
[3] Juges.
[4] Chefs religieux officiels agréés par le gouvernement.
[5] Chefs civils au titre arabe.
[6] Chefs suprêmes de la religion.
[7] Sur toute cette affaire, voir le dossier publié dans la D.C., t. 14, col. 363-383.
[8] Cité dans la D.C., t. 9 [1923], col. 34.